« Si l’Iran veut se battre, ce sera la fin officielle de l’Iran. Ne menacez plus jamais les États-Unis.», tweetait Trump le 20 mai dernier. Il vient de renouveler brutalement ses propos bellicistes : « Toute action de l’Iran visant n’importe quel intérêt américain déclenchera une réponse d’une force puissante et écrasante […] Dans certains domaines, écrasante signifiera annihilation ». Ces nouvelles menaces ne relèvent pas de la simple mise en scène de Trump par lui-même au moment où il s’engage dans une nouvelle campagne électorale en vue de l’élection présidentielle, dans deux ans. Au-delà de la brutalité du personnage, ces menaces sont portées par l’État américain, le Pentagone, elles sont celles que la première puissance mondiale adresse au-delà de l’Iran au monde entier.

Elles interviennent après plus d’un an d’escalade, en particulier depuis la provocation à l’égard du peuple palestinien de l’installation de l’ambassade américaine en Israël à Jérusalem, en grande pompe en compagnie de l’Arabie saoudite. Et au moment où s’affiche le fiasco des promesses provocatrices annoncées alors, le prétendu « accord du siècle » présenté au Bahrein par Kushner, gendre et conseiller de Trump. Cette farce boycottée tant par les Palestiniens que par Israël visait à acheter pour 50 milliards de dollars l’abandon par les Palestiniens de leurs droits à un État et leur acceptation de l’occupation des territoires par Israël.

Mise en scène de Trump par Trump et menaces militaires

L’affrontement déclenché le 13 juin suite à l’attaque de deux pétroliers, norvégien et japonais, près du détroit d’Ormuz par lequel transite un cinquième de la production mondiale de pétrole a relancé l’offensive américaine.

Alors que l’Iran nie toute responsabilité, Trump l’a accusé immédiatement sans apporter la moindre preuve. En réponse, le ministre des affaires étrangères iranien, Mohammad Javad Zarif, a accusé Washington de « sabotage diplomatique » jugeant plus que « suspectes » ces attaques, survenues le jour même de la visite à Téhéran du premier ministre japonais, Shinzo Abe.

Le ton monte encore d’un cran le 20 juin après que l’Iran a abattu un drone de surveillance de l’US Navy qui a violé, selon lui, son espace aérien.

En représailles les USA ont envisagé des frappes avant que Trump ne se ravise au dernier moment : « Nos armes étaient chargées et nous étions prêts à riposter la nuit dernière contre trois sites différents quand j’ai demandé combien allaient mourir. [..] Dix minutes avant la frappe, je l’ai stoppée. C’était disproportionné par rapport à une attaque contre un drone ». Là encore, au-delà de la mise en scène de Trump par Trump, de cette sinistre farce, le message est clair, les USA sont prêts à la guerre et y préparent l’opinion.

Les sanctions économiques, armes de guerre

Et, le 24 juin, Trump a signé un décret imposant de nouvelles sanctions, renforcement de l’embargo, gel des avoirs à l’étranger de certains dignitaires iraniens, considérées par l’Iran « comme un acte hostile conforme au terrorisme économique et à la guerre économique lancés contre notre Nation » et comme une volonté de « fermer de façon permanente la voie de la diplomatie avec le gouvernement prêt à tout ». Depuis le retrait des USA de l’accord international sur le nucléaire iranien, en mai 2018, l’Iran est étranglé par l’embargo qui vise à le mettre à genoux et à lui imposer les décisions US, voire à provoquer l’écroulement du régime. Toute entreprise achetant du pétrole iranien peut être poursuivie par la justice américaine. Les exportations de pétrole iranien sont tombées à 750-900.000 barils par jour, essentiellement à destination de la Chine, contre 2,6 millions de barils par jour il y a un an. Une situation dramatique pour Téhéran dont les hydrocarbures fournissent la quasi-totalité des recettes en devises. La population paye la facture par la hausse des prix, le chômage, la misère.

Cette politique semble surtout attiser les sentiments antiaméricains et nationalistes dont se sert le pouvoir des mollahs. En réponse à ces nouvelles sanctions, ces derniers ont annoncé qu’ils commenceraient à rompre leurs engagements sur le nucléaire le 7 juillet, si les autres signataires de l’accord (Chine, Russie, France, Royaume-Uni et Allemagne) ne trouvaient pas le moyen d’atténuer le poids des sanctions américaines. Le Drian, ministre des Affaires étrangères français, s’est empressé de dénoncer cette « grave erreur »...

Déploiement militaire

Dès le 17 juin, Washington a annoncé l'envoi de 1000 militaires supplémentaires « à des fins défensives pour répondre à des menaces aériennes, navales et terrestres au Moyen-Orient ». Le 5 mai, avait déjà été annoncé le déploiement dans les eaux du golfe Arabo-Persique du porte-avions Abraham-Lincoln et de son groupe de combat. Quatre bombardiers stratégiques B-52 sont arrivés le 8 mai sur la base qatarie d’El-Udeid, à quelques minutes de vol de l’Iran. Un autre navire de l’US Navy, l’Arlington, transportant une force de marines, des véhicules amphibies de débarquement, des hélicoptères et une batterie de missiles antimissiles Patriot, est en route vers le Moyen-Orient.

Le Pentagone a engagé un plan d’intervention qui prévoit le déploiement dans la région de 120 000 hommes – à peine moins que pour la guerre contre l’Irak. L’Arabie saoudite aurait accepté d’ouvrir son espace aérien à des avions de combat israéliens s’ils devaient participer à des frappes en Iran.

Et si, pour le moment, Israël reste en retrait, il se félicite de l’offensive américaine et c’est depuis Jérusalem que Bolton, conseiller à la sécurité nationale de Trump, déclarait « notre armée est reconstruite, nouvelle et prête à décoller » alors que Pompeo, le secrétaire d’État, précisait « L’objectif de mes entretiens avec le royaume saoudien et les Emirats Arabes Unis est de refuser à l’Iran les moyens de fomenter la terreur, de développer son système d’armes nucléaires et de développer son programme de missiles » et annonçait la volonté des USA de constituer une coalition internationale contre l’Iran comme ils le firent, en 2003, contre l’Irak.

Continuité de la politique de l’État US et stratégie militariste mondialisée

Il serait erroné de croire que cette politique va-t-en-guerre obéit aux errements du seul Trump ou des faucons, Bolton et Pompeo, qui le conseillent. Si la mise en scène particulièrement odieuse relève du cynisme du personnage, le fond obéit à une logique profonde, tout aussi cynique et brutale, celle de la défense des intérêts de la première puissance mondiale et de ses multinationales. Bolton est le symbole de cette continuité, lui qui avait fait ses armes avec les néoconservateurs de l’équipe de Bush au début des années 2000 et avait été un des artisans de l’invasion de l’Irak en 2003, artisan du mensonge d’État des armes de destruction massive qui n’ont jamais existé. Intoxications, falsifications, manipulations, provocations, après l’Irak, la Libye et le Yémen, l’État américain a désigné sa cible quels qu’en soient les risques et le prix.

Ce qui a changé, ce sont les coordonnées internationales tant économiques que politiques.

Il est certain qu’aujourd’hui les USA ne veulent pas la guerre ou plutôt préfèrent, si possible, l’éviter, convaincus que le rapport de force est entièrement en leur faveur. Ce que voulait souligner Trump en déclarant à propos de la possibilité d’un affrontement militaire : « Nous sommes dans une position très forte, et ça ne durerait pas très longtemps, je peux vous le dire ». Une façon de dire clairement qu’ils sont prêts à en prendre le risque et à en assumer les conséquences qui ne pourraient rester limitées à l’Iran, qui embraseraient le Moyen-Orient, provoqueraient une recrudescence du terrorisme en réponse à l’odieux terrorisme d’État américain, aggraveraient l’instabilité et les tensions internationales.

On assisterait à une flambée des cours en raison des risques de perturbation du trafic pétrolier dans le détroit d'Ormuz, à un ralentissement des échanges internationaux et vraisemblablement à une récession mondiale, dont les éléments sont déjà en place.

Le Conseil de sécurité de l’ONU a appelé « au dialogue », la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni, « gravement préoccupés par les tensions croissantes dans le Golfe », ont appelé aussi « à la désescalade », la Chine au « sang-froid » et à la « retenue ». Ces déclarations sont impuissantes à empêcher les USA de se préparer à tout faire pour contrer l’évolution mondiale qui, inévitablement, remet en cause leur hégémonie dominatrice qui pille et menace les peuples.

La politique de la bourgeoisie américaine et de son État est une catastrophe pour la planète entière.

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